Le gouvernement a annoncé de nombreuses mesures de relance pour le secteur automobile qui visent non seulement les particuliers mais aussi les entreprises pour les inciter à verdir leur flotte de véhicules au plus vite. François Gatineau, consultant expert mobilité électrique, fait le point pour s'équiper au mieux.

 

Ces annonces portent notamment sur le soutien de la demande via des mécanismes d’aides à l’achat fortement concentrées sur les véhicules électrifiés, sur l’accélération du déploiement de l’infrastructure nécessaire à l’usage de ces véhicules électriques ou encore sur l’investissement pour faciliter de nouvelles solutions et offres technologiques bénéficiant aux utilisateurs professionnels et privés. Prises globalement, elles s’insèrent dans un contexte de transition qui a démarré depuis quelques mois déjà…

 

Évolution du contexte réglementaire

La Loi d’Orientation des Mobilités, votée la veille de Noël dernier, et ses décrets d’application, qui sont paru ou vont paraitre d’ici l’été, instaurent plusieurs dispositions visant à transformer l’usage des véhicules et accélérer l’adoption des véhicules bas carbone.

Premièrement, la mise en place de quotas de véhicules à faibles émissions pour les flottes d’entreprise de plus de 100 véhicules est séquencée dans le temps avec, dès 2022, 10 % du parc à renouveler en véhicule bas carbone (autant dire électrique à batterie ou hybride rechargeable au vu de l’offre disponible), 20 % en 2024, 35 % en 2027 puis la moitié en 2030. Ensuite, des voies prioritaires à ces véhicules bas carbone seront mises en place sur les axes denses (comme l’expérience positive menée en Norvège). Les zones uniquement accessibles aux véhicules à faible émission vont fleurir dans nos villes dès cette année pour améliorer la qualité de l’air et la santé des habitants.

La mise en place de plans de mobilité entreprise pour toutes celles dont les établissements comptent plus de 50 personnes est une manière de répondre favorablement à la demande de solutions alternatives et écologiques par les salariés. Enfin, l’obligation d’équipement en borne des parkings dès janvier 2025 va nécessiter de monter des projets d’installation.

 

Faire de ces nouvelles dispositions des atouts pour l’entreprise

Les acteurs économiques équipés de véhicules bas carbone seront privilégiés sur les projets et les marchés situés en zone à circulation contrôlées. En être équipées leur donnera un avantage compétitif notable. Il faudra néanmoins modifier la manière dont les processus opérationnels liant l’usage du véhicule électrique à ces activités professionnelles sera réalisée.

Au 1er janvier 2025, les parkings non résidentiels (sauf pour les PME) avec plus de 20 emplacements auront au minimum un emplacement avec borne de recharge. Et par extension, un point de charge par tranche de vingt emplacements supplémentaires équipera les grands parkings (sauf si des travaux importants d’adaptation du réseau électrique sont nécessaires). Ce sont donc des changements importants qui touchent non seulement l’infrastructure gérée par les services généraux, mais aussi la dotation adéquate en véhicules appropriées aux activités de l’entreprise.

 

 

À quels usages faudra-t-il répondre ?

Les infrastructures des parkings d’entreprise devront répondre à 6 grandes catégories d’activités professionnelles :

  • Logistique : dernier kilomètre, messagerie, distances courtes, moyennes ou longue
  • Commerciale : déplacement dans une zone cliente
  • Opérations : du dépannage urgent aux chantiers longues durée
  • Management : réunions et visites multisites
  • Réception des sous-traitants, visiteurs et autres acteurs
  • Accueil des salariés sur le site de l’entreprise avec leur véhicule personnel ou le véhicule de fonction ou de service

 

Les mouvements pendulaires des véhicules utilisés par chacune de ces catégories sont évidemment différents. Par conséquent, il est indispensable de dresser le panorama correspondant au profil de chaque entreprise sur ces différentes catégories.

 

Quel véhicule choisir ?

Partant des différentes natures d’activités précédentes, le choix du véhicule électrique est aussi essentiel. En effet, si l’équipe de dépannage et d’intervention de votre entreprise effectue des tournées quotidiennes de 50 à 70 km par jour, qu’elle est dotée d’un véhicule adapté pour contenir les accessoires de travail, et dont l’autonomie maximum est de 300 km, il ne sera pas utile de la recharger tous les jours.

Le choix du véhicule s’effectuera donc par rapport à 6 critères : activité professionnelle cible, zones d’intervention, distance à parcourir, volume nécessaire, bilan économique cible, capacité technique de recharge. Ces véhicules pourront être soit des hybrides rechargeables, soit des électriques à batterie et, plus tard, des hydrogènes à pile à combustible.

 

Quelle infrastructure de recharge déployer sur le site ?

À partir des usages décrits précédemment, la capacité de la batterie (ce qui lui donne l’autonomie kilométrique) des véhicules choisis et ses modes de recharge rentrent en compte pour définir l’infrastructure adaptée. En effet, certains véhicules proposent des manières de se recharger différentes. Par exemple, certains se rechargent en courant alternatif (AC) jusqu’à seulement 11 kW, d’autres ne permettent la recharge continue que pour 50 kW. Ainsi, selon les véhicules choisis, il est inutile de se doter d’une borne de recharge 22 kW en AC ou 100 kW en DC si le véhicule ne l’accepte pas.

Important également, le dimensionnement énergétique du site. L’entreprise pourra opportunément décider de mener une étude de l’ensemble de ses usages électriques, avec ceux de ses futurs véhicules électriques, pour mettre en place un système technique d’optimisation qui permettra d’adapter le bon contrat avec un fournisseur d’électricité, à un prix optimisé.

 

Le plan de mobilité entreprise peut-il s’inscrire dans ce travail de verdissement des flottes ?

Un tel plan de mobilité agrège des mesures complémentaires sans contrainte légale mais basées sur le bon sens. L’objectif est de diminuer l’impact environnemental de l’entreprise. Les solutions de mobilité qui s’inscrivent pleinement dans ce plan comme l’autopartage, le covoiturage, l’utilisation de véhicule de fonction sont très adaptées aux véhicules électriques. Ces derniers sont parfaitement communicants et toutes les données qu’ils produisent s’interfacent très bien aux logiciels de flotte, d’autopartage et de covoiturage.

 

Quelle rentabilité pour son parc ?

L’électricité utilisée pour ces véhicules électriques coûte 3 fois moins que l’essence, la facture de fin de mois s’en ressentira. Le principe de chargement des véhicules électriques est maintenant bien connu. Les nouveaux modèles de véhicules électriques offriront également la décharge. Cette capacité va permettre de revendre au réseau électrique au bon moment, par exemple lors d’un pic de consommation, son électricité stockée dans la batterie de sa voiture électrique. Cette technologie a pour nom le V2G (pour Vehicle-to-Grid). La voiture électrique génère ainsi des petits revenus complémentaires.

Les constructeurs automobiles comme Nissan, les énergéticiens comme EDF et d’autres acteurs se lancent peu à peu sur ces offres V2G. RTE estime que si un utilisateur se dote d’un véhicule électrique avec technologie bidirectionnelle, ainsi qu’une borne intelligente pour piloter les phases de charge et de décharge de la batterie en fonction des besoins, il pourrait ainsi économiser entre 100 et 200 € par an de consommation (électrique).

 

 

L’AUTEUR

François Gatineau, consultant expert mobilité électrique chez Mobileese - société de conseil, formation et ingénierie qui accompagne les organisations pour réussir leurs projets Mobilité et Energie.

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