Neuf start-ups du « future of work » se sont associées pour créer le premier événement de The Next Workplace. Au programme : quatre tables rondes pour comprendre et décrypter l’expérience de travail hybride de demain. Retour sur cette initiative riche en échanges.

Osol, Slean, Totem, Ubiq, Café, Naboo, Uzfull, Leet Design et Growsters ont coorganisé le 6 décembre dernier la première édition de The Next Workplace. Un évènement dont Workplace Magazine était partenaire et qui a réuni pas moins de 300 participants le temps d’une après-midi dans un ancien garage au style industriel dans le 11e arrondissement de Paris. Au programme : quatre conférences sur la culture d’entreprise, le nouveau rôle des bureaux et l’intégration de l’environnement de travail dans les stratégies RH. Retour sur les principaux enseignements et échanges des acteurs du future of work venus témoigner.

Le bureau, nouveau lieu d’une expérience émotionnelle ?

« Le bureau n'est pas mort. Il n'a jamais eu autant d'importance », affirme Ghislain Phan Dinh, workplace strategy manager chez Doctolib. Loin d’être une deuxième maison, le bureau a un rôle à part entière. « Si on explique aux salariés que le bureau c’est comme à la maison avec deux heures de transport en plus, la workplace ne gagne pas le match », interpelle Dominique Delattre, directrice des opérations workplace de Chateauform’ Inside. Avec le développement des modes de travail hybride, le bureau doit désormais être « un concentré de culture », « une place de rencontre » pour réunir et rassembler les collaborateurs. Pour cela, les participants mettaient tous l’accent sur l’importance de l’expérience, qui se veut davantage tournée vers la personnalisation, les usages et les rites. Chez BlaBlaCar, l’expérience collaborateur a par exemple été complètement repensée selon 3 persona : full remote, 2 jours de télétravail par semaine et full bureau. « Pour chacun de ses persona, nous nous interrogeons sur l’expérience la plus appropriée : quel onboarding ? Quel parcours ? », indique Perrine Labesse, head of engagement and people ops. « Le collaborateur est devenu beaucoup plus exigeant post-covid. Cela permet de réinventer l’expérience régulièrement, en éveillant la curiosité, en créant de nouvelles émotions. C’est un challenge très intéressant », témoigne Tarik Lebtahi, head of people experience lab de 3DS - Dassault Systèmes.

Sur le lieu de travail, Dominique Delattre mise elle aussi sur « le côté émotionnel ». « Cela commence par un accueil physique, une reconnaissance, et non un accueil digital. Il est important que le collaborateur se sente accueilli, attendu au bureau. Cela change tout dans la relation entre l’individu et l’employeur ». Chez Deezer par exemple, les réceptionnistes sont placés au cœur des espaces, au milieu des salariés. Pour s’assurer de créer une expérience optimale, les entreprises doivent se demander qui sont leurs occupants et visiteurs, quels sont leurs parcours respectifs, quand et comment veulent-elles que les gens se rencontrent… « Sans oublier d’avoir une vraie réflexion sur la restauration d’entreprise afin de permettre aux collaborateurs de déjeuner ensemble et de les régaler. Il faut provoquer ce moment festif. Cela a un coût certes, mais les titres-restaurant aussi. C’est un point très important », poursuit Dominique Delattre, enjoint par Ghislain Phan Dinh qui a mené un travail de refonte de l’offre fooding chez Doctolib. Pour les participants, l’expérience se pense plus que jamais avec une notion de service hôtelier, un service « d’hyperproximité et d’hyperpersonnalisation » selon Maxime Cousin, CEO d’Osol. « Il y a un parallélisme de conception entre le bureau et l’hôtel intéressant à analyser », notait Ghislain Phan Dinh.

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Pour rester compétitives et attractives, Dominique Delattre encourageait également les entreprises « à conserver une zone dédiée à l’expérimentation des organisations les plus folles. Vous serez surpris du résultat et de votre capacité à innover et vous réinventer », conseille-t-elle. Un défi d’autant plus grand que le cycle de transformation du bureau est passé de sept ans à un ou deux ans selon Frederick Ros, head of digital workplace chez Amadeus.

Comment concilier flexibilité, collectif et culture d’entreprise ?

Avec le développement du télétravail et la nouvelle organisation du travail hybride, un constat s’impose : l’environnement de travail ne se pense plus uniquement entre quatre murs. Certains imaginent alors déjà une société post-covid dans laquelle les salariés choisiraient de plus en plus leur lieu de vie par rapport à leurs envies et leurs besoins plutôt que par rapport à leur lieu de travail. « La next workplace sera forcément décentralisée, affirmait Kévin Bouchareb, directeur future of work chez Ubisoft. Les franciliens qui vivent là par dépit doivent pouvoir trouver leur bonheur ailleurs. La Maif l’a fait, la Mutuelle Générale aussi… Le télétravail est une opportunité inédite de permettre aux Français de se rapprocher des campagnes, des petites villes. C’est une grande évolution sociale. »

Mais alors comment (re)créer un collectif et faire vivre une culture d’entreprise, et ce, même à distance ? « Je ne pense pas que la distance soit mécaniquement un frein au collectif. Quand on pense la distance avec une intention, par définition, ce ne sera pas un frein à la construction d’une culture. Au contraire, on doit imaginer un nouveau contrat social où on se dit que la distance n’est pas une menace mais potentiellement une nouvelle opportunité », répondait Kévin Bouchareb. Même constat du côté de Pamela Corbin-Audoux, responsable de la diversité et de l’inclusion chez Decathlon Technology, pour qui « la distance est faux problème. Si on veut créer du lien, on y arrive. C’est une démarche personnelle. Il existe plein de moyens, de solutions pour faire du lien. Mais il faut faire l’effort, se mettre un peu en danger et faire preuve d’inclusion dans la conception même des outils et des lieux. »

Pour susciter de l’engagement et faire vivre la culture, certaines entreprises ont fait le pari de réunir les salariés lors d’évènements « offsite ». C’est le cas de Numa, spécialisée dans la formation, qui organise ce genre d’évènement une fois par mois. « C’est clé pour faire tout ce qu’on ne peut pas bien faire en ligne. C’est une manière de (re)découvrir les personnes avec qui l’on travaille », explique Anselme Jalon, CEO de Numa.

À l’issue des débats, une même idée ressortait des échanges : l’environnement de travail du futur sera plus flexible (80 % des employés veulent de la flexibilité au travail (lieu et temps) rappelait Gabriel Frasconi, directeur de Slack France dans sa keynote de clôture), mais aussi plus modulaire et personnalisé afin de s’adapter aux besoins de tous, sans oublier plus inclusif.