
Impact et business font-ils bon ménage ? De prime abord, l’équation semble insoluble : prioritairement mues par la recherche du profit, les entreprises n’ont, a priori, pas de raison de tenir compte des effets potentiellement néfastes de leurs activités en matière sociale ou environnementale. Mais la réalité est plus nuancée. La montée en puissance du concept déjà ancien de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) – il a été forgé dans les années 1960 – s’est accompagnée d’une prise de conscience du rôle que doivent jouer les acteurs économiques sur les sujets écologiques, sociétaux ou encore de bonne gouvernance. Ils sont désormais attendus sur ces questions, notamment par les jeunes générations qui n’hésitent plus à choisir un employeur sur la base de ces critères. De ces attentes est né un nouveau métier, le chief impact officer (ou head of impact selon les entreprises), qui a pour tâche de mesurer l’impact positif et négatif de l’entreprise en intégrant à la fois les parties prenantes internes (salariés, actionnaires, représentants du personnel) et externes (clients, fournisseurs, institution…) et d’identifier des leviers d’actions afin de devenir toujours plus vertueux.
C’est sur cette étroite ligne de crête qu’évolue Kat Borlongan. Recrutée en décembre dernier par ContentSquare, celle qui s’est fait connaître en dirigeant la French Tech entre 2018 et 2021 entend faire de l’impact un sujet central chez cette licorne spécialisée dans l’analyse de l’expérience client. À défaut d’avoir occupé des fonctions équivalentes dans ses précédents emplois, Kat Borlongan s’est déjà familiarisée avec les sujets de l’impact comme la diversité, l’inclusion, l’écologie ou encore la philanthropie. À la fin de sa mission à la French Tech, elle avait notamment commencé à mettre en place un travail de board impact pour aborder de manière structurelle les standards de la tech sur les sujets d’égalité homme/femme, de climat ou d’inclusion. « Cette expérience m’a permis d’amorcer ma transition vers ContentSquare. C’est toujours un plus de disposer d’une expertise dans des domaines proches de la stratégie d’impact que l’on veut mettre en place, ce qui comprend généralement - mais pas exclusivement - la diversité et l’inclusion, la décarbonisation, les normes ESG, l’éthique en matière de données et de confidentialité », détaille-t-elle. Pour le reste, la chief impact officer estime que ce nouveau métier demande peu ou prou les mêmes compétences « que l’on attendrait de tout autre directeur en charge d’un périmètre si transverse et pluridisciplinaire ». À savoir, la capacité à définir une vision et une stratégie claires auxquelles tout le monde peut adhérer, à réunir et faire confiance à la bonne équipe et à créer un environnement de travail sain où chacun a les moyens de réussir.
Priorité à l’accessibilité et l’éco-conception
Chez ContentSquare, l’équipe impact est composée d’une dizaine de personnes et structurée en cinq pôles. « Quatre sont des piliers travaillant de manière transversale (diversité et inclusion, digital accessibility, sustainability et digital trust). Le cinquième, la philanthropie, s’articule autour de la fondation de l’entreprise qui collabore avec l’ensemble des services ainsi que de nombreux acteurs externes (partenaires, instituts de recherche, associations…) », précise Kat Borlongan.
D’ici la fin de l’année, les effectifs de l’équipe devraient grimper à 20 collaborateurs, avec une ligne claire : l’impact ne doit pas se limiter chez ContentSquare à un portfolio de projets déconnectés de l’activité de l’entreprise. « Planter des arbres ou ramasser des déchets n’a aucun sens si ces opérations ne s’inscrivent pas dans un contexte où nous avons entièrement revu notre manière de fonctionner sur la base de critères qui incluent l’impact, insiste Kat Borlongan. Car cela va bien au-delà de la RSE et couvre tellement de sujets qu’on ne peut (malheureusement) pas s’attaquer à tous les chantiers. Si l’on veut réaliser des changements concrets, il faut établir des priorités. C’est pourquoi je vais me concentrer, dans un premier temps, sur les thèmes de l’accessibilité, de l’éco-conception et de la confiance numérique (digital trust). Par la suite, on ne manque pas d’idées de sujets à ajouter à notre liste ! ».
« L’impact va bien au-delà de la RSE et couvre tellement de sujets qu’on ne peut (malheureusement) pas s’attaquer à tous les chantiers. Si l’on veut réaliser des changements concrets, il faut établir des priorités. C’est pourquoi je vais me concentrer, dans un premier temps, sur les thèmes de l’accessibilité, de l’éco-conception et de la confiance numérique » Kat Borlongan
Des thématiques qui touchent forcément de manière directe ou indirecte l’environnement de travail… « Le travail que nous faisons implique de repenser nos politiques internes, comme le sujet des voyages, nos outils (les niveaux d’accessibilité de nos logiciels), ou encore notre lieu de travail en s’assurant que notre mobilier de bureau soit issu de filières éthiques. Cela passe également par une réflexion vis-à-vis de nos pratiques, en veillant par exemple au caractère inclusif de nos recrutements », développe Kat Borlongan.
En bonne place
Quatre mois après son arrivée, la chief impact officer prend encore le temps de rencontrer les différentes équipes de ContentSquare pour leur préciser son rôle. « Je dois expliquer l’importance de l’impact et la manière dont il doit être pris en compte dans les process. Car nous ne pouvons pas réussir seuls ». Au quotidien, l’équipe impact de ContentSquare collabore avec une multitude d’autres fonctions (philanthropie, RH, legal, finance, marketing, sales, customer success…) ainsi qu’avec des acteurs externes comme des instituts de recherche ou des acteurs de la sphère associative. « Un projet nécessite de mobiliser au moins deux départements différents. Sans leur collaboration en bonne intelligence, je ne peux pas le mener à bien », ajoute Kat Borlongan. Et preuve que le sujet de l’impact est pris au sérieux dans les entreprises, ContentSquare a offert à sa nouvelle recrue une place au Comex. Être sur un pied d’égalité avec les directions marketing ou financière « change tout », selon Kat Borlongan. À titre plus personnel, cette dernière se fixe comme objectif de « démontrer qu’une entreprise de la tech, même si elle n’est pas forcément née entreprise à mission, peut à la fois devenir leader de son secteur et obtenir des résultats concrets en matière d’impact. Démontrer qu’au-delà des mots, la volonté et l’engagement paient et font de notre ambition une réalité ».
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